Aujourd’hui, les technologies sont omniprésentes dans notre quotidien, et leur influence sur la santé est un sujet auquel nous ne pouvons plus échapper. Les innovations numériques bouleversent les soins de santé, la prévention, mais aussi les habitudes de vie des plus jeunes et des plus âgés. En tant que société, il est crucial de se pencher sur ces bouleversements, pour comprendre leurs effets et anticiper les défis qu’ils posent pour notre santé durable.
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La surexposition aux écrans : un problème de plus en plus sérieux
Comment ignorer la question de la surexposition des jeunes aux écrans, un enjeu que les parents, éducateurs et professionnels de la santé commencent à mesurer, mais dont les conséquences à long terme restent largement insoupçonnées? Nous savons que cette immersion numérique peut entraîner des problèmes de sommeil, de concentration, voire de sédentarité. Mais il est probable que de nouvelles formes de maladies émergent avec le temps, liées à cette dépendance croissante aux écrans. Les signes en sont déjà visibles, et l’urgence d’une réflexion collective se fait sentir.
En France, près d’un parent d’enfant de 3 à 10 ans sur deux (48 %) en France déclare avoir un enfant concerné par au moins un problème de vue.
En France, l’Observatoire de la Vue des enfants tire la sonnette d’alarme : « Si le temps d’écran des enfants est en léger recul par rapport à 2023 (2h04 contre 2h18), il demeure trois à quatre fois plus élevé que celui recommandé par les spécialistes (…) les enfants consacrent toujours plus de temps aux (téléphones intelligents), en particulier le soir après les repas. » Près d’un parent d’enfant de 3 à 10 ans sur deux (48 %) déclare par ailleurs avoir un enfant concerné par au moins un problème de vue.
En étudiant l’état de la santé cardiométabolique des jeunes Québécois, de 2012 à 2017, des chercheurs de l’Université de Sherbrooke dirigés par Mario Leone ont parcouru six villes du Québec — Montréal, Québec, Laval, Trois-Rivières, Sherbrooke et Saguenay — pour faire passer le fameux test « du BIP » (Léger navette) à 3 700 jeunes, sur une distance de 20 mètres, à répétition, à un rythme qui augmente chaque minute. Ils ont alors constaté la manifestation d’une diminution significative des capacités physiques chez les enfants et adolescents âgés de 6 à 17 ans, avec une grande majorité d’entre eux (58 % des garçons de 17 ans et 70 % des filles du même âge) s’exposant au risque de développer des troubles de santé tels que des problèmes cardiométaboliques importants dans les années à venir.
Outre les problèmes de vue et de sédentarité, des problèmes cutanés, tels que des irritations et dermites (comme la dermatose faciale de type rosacée) liés au contact récurrent d’appareils sinon à la surexposition à leurs écrans, peuvent aussi être engendrés, bien qu’ils passent souvent sous le radar et que la cause technologique soit rarement soupçonnée.
Des bénéfices pour la prise en charge et les soins
Alors, comment favoriser un usage encadré, plus sain des technologies, sans pour autant les diaboliser, ni se priver de ce qu’elles ont de mieux à offrir? Car lorsque bien utilisées, ces mêmes technologies peuvent aussi se révéler être un formidable outil de lien social, notamment pour les personnes âgées. Dans une société où l’isolement est parfois une réalité douloureuse, les solutions numériques permettent aux aînés de rester connectées avec leurs proches, mais aussi avec des communautés d’intérêt. Pensons aux appels vidéo, plateformes de partage, applications de suivi de santé personnalisé, et même à la réalité virtuelle… Tout cela contribue à rompre l’isolement et à maintenir une meilleure qualité de vie, parfois bien plus que ce qu’offriraient des visites sporadiques.
Et c’est sans compter le nombre de technologies de pointe, souvent alimentées par l’intelligence artificielle, qui permettent d’aborder autrement la santé, non pas seulement en révolutionnant les soins, mais aussi en soutenant la recherche qui permet de mieux comprendre, diagnostiquer et prévenir les maladies, dans des secteurs comme la génétique, notamment pour mieux déterminer votre risque de développer un cancer, ou la génomique, qui permet d’adapter le traitement d’un cancer déjà diagnostiqué, et plus encore.
Plus récemment, on apprenait que l’IA était désormais sollicitée par les embryologistes pour stimuler la fécondation. Une étude publiée le 20 mars dans la revue The Lancet rend compte de la chute drastique des taux de fécondité dans le monde, rapportant que d’ici 2050, le taux de fécondité moyen tombera à 1,8 enfant par femme dans les trois quarts des pays, soit en dessous du seuil de renouvellement des générations situé à 2,1 enfants par femme. L’une des raisons identifiées par les chercheurs de l’Inserm, un institut public de recherche médicale, est l’âge des femmes désirant concevoir un premier enfant, car elles naissent avec une réserve d’ovocytes qui diminue progressivement tout au long de leur vie, jusqu’à la ménopause. Pour répondre à cette problématique, les chercheurs tentent de développer des programmes d’IA pour améliorer les taux de fécondation in vitro (FIV), une pratique qui consiste à implanter plusieurs embryons simultanément afin d’augmenter les chances de grossesse, mais qui n’est pas sans comporter des risques, comme l’accouchement prématuré. Avec l’IA, on vise à ne sélectionner qu’un seul embryon à implanter, réduisant ainsi ces risques.
Miser davantage sur la prévention des maladies
Enfin, il est essentiel de replacer la technologie dans une perspective de prévention. Si nous savons que certaines mauvaises habitudes liées au numérique doivent être régulées, nous devons aussi voir dans ces outils des alliés puissants pour améliorer notre santé. Les applications de suivi de l’activité physique, les plateformes éducatives de santé, ou encore les dispositifs de téléconsultation permettent d’anticiper, d’accompagner et d’agir en amont de certaines pathologies. C’est là tout l’enjeu de la santé durable : prévenir pour mieux guérir.
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