Montre connectée, panier de basket augmenté, tapis de course interactif, vélo de ville géolocalisable… Depuis quelques années, les nouvelles technologies ont pris d’assaut le monde du sport, jusqu’à modifier notre rapport à l’activité physique. Et si ces outils intelligents permettaient d’augmenter notre pratique sportive ? Des responsables de deux grandes enseignes françaises de sport apportent leur éclairage.
« On est des ovnis pour Decathlon ». C’est en ces quelques mots que Jérémy Wachbar, directeur du management produit au sein de l’enseigne de sport préférée des Français, se présente lors d’une conférence au SIdO 2024. Son équipe Connected Sports Platform (CSP) a été créée il y a deux ans dans l’objectif de faire émerger des objets connectés au sein de la marque Decathlon.
Depuis 2022, l’équipe est passée de 20 à 120 personnes et a lancé pas moins de 300 références. Leur secret ? La méthode « Fail fast, learn fast » (échoue vite, apprends vite) propre aux start-up. « On s’est beaucoup inspiré des start-up pour la sélection naturelle et le côté transverse de l’équipe, avec l’idée d’aller plus loin que de simples fournisseurs d’objets connectés » souligne Marc Balme, responsable du pôle ingénierie de l’enseigne de sport. Une stratégie qui embrasse pleinement l’ambition de la marque : « Move People Through the Wonders of Sports », en français « Faire bouger l’Humanité grâce à la magie du sport », qui passe inévitablement par la connectivité des produits sportifs.
La gamification pour les sports collectifs
Parmi toutes les innovations de Decathlon présentées au SIdO 2024, un objet se fait remarquer : le « kit Decathlon Basket Play », un anneau connecté qui vient s’accrocher au panier de basket. « On s’est rendu compte que les ados qui ont un panier de basket dans leur jardin arrêtaient de jouer après seulement quelques tirs » se souvient Jérémy Wachbar. L’objectif est alors de les garder dehors plus longtemps.
« On s’est beaucoup inspiré des start-up pour la sélection naturelle et le côté transverse de l’équipe, avec l’idée d’aller plus loin que de simples fournisseurs d’objets connectés »
— Marc Balme, responsable du pôle ingénierie à Decathlon
Pour répondre à cet enjeu, l’équipe met au point une solution à base de quelques accéléromètres et capteurs qui vont apporter de la « gamification » (en français ludification) à la pratique sportive.
L’anneau de détection va enregistrer les paniers marqués et proposer quatre jeux, seul ou en équipe, pour « pimper » les sessions sportives des adolescents. Résultat, le temps de pratique est passé de 20 à 40 minutes. Un parfait exemple à la croisée du monde numérique et des produits physiques, qui nécessite néanmoins de débourser la somme de 50 euros.
La connectivité pour les sports individuels
Autre best-seller de l’enseigne, le tapis de course connecté « Run 500 ». Cet outil 3.0 permet de répondre aux freins habituels de la course à pied en extérieur – météo, pollution, planification de la vie familiale, contraintes de terrain – tout en proposant une expérience augmentée aux coureurs.
« Avant la course était un sport individuel qui rassemblait, maintenant, c’est un sport individualiste qui nous met en compétition : On court pour les “stats” et pour partager notre entraînement sur les réseaux sociaux »
— Romain Revol, commercial chez Intersport
Grâce à sa connectivité wifi et sa console tactile, il est possible d’accéder à 100 000 vidéos de course filmées dans 90 pays sur 5 continents, via notamment l’application Kinomaps déjà présentée par CScience. « La connectivité oblige ici à repenser l’expérience dans sa globalité » explique Marc Balme à propos du tapis de course. Une expérience qui semble séduire : le tapis est noté à 4.67/5 sur le site de Decathlon.
Une application permet de gravir les sommets mythiques d’Auvergne-Rhône-Alpes depuis son salon
Pour Romain Revol, commercial chez Intersport, les montres connectées ont radicalement transformé la pratique de la course à pied. Il travaille depuis six ans pour l’autre géant français de sport et rapporte que les ventes de ces bracelets high-tech ont explosé, contribuant à bouleverser la discipline.
« Avant la course était un sport individuel qui rassemblait, maintenant, c’est un sport individualiste qui nous met en compétition : On court pour les “stats” et pour partager notre entraînement sur les réseaux sociaux » déplore-t-il. Ce sportif aguerri confirme néanmoins que les montres connectées ont indéniablement augmenté le nombre de coureurs : « Ce qui est bien avec ces outils connectés, c’est que ça motive les gens à courir ». Il donne l’exemple du marathon international du Beaujolais (MIB), lancé en 1997 par une petite association. Il réunit aujourd’hui plus de 20 000 coureurs qui lui confère le titre de plus grande course festive de France.
La géolocalisation pour une mobilité urbaine sécurisée
Mais la connectivité des produits de sport va plus loin. L’équipe CSP de Decathlon s’est penchée sur l’un des principaux freins à l’achat d’un vélo électrique, notamment pour la mobilité urbaine : le vol.
Au SIdO, les deux responsables ont présenté Elopse 901E Connect, le premier vélo connecté intelligent qui intègre une technologie permettant de localiser son vélo 24h/24 et de notifier son propriétaire en cas de mouvements inhabituels.
Il entend répondre à une demande ambitieuse : « Je veux que des millions de personnes laissent leur voiture chez eux », déclare le directeur des équipes d’ingénieurs. Un objectif à la portée de l’enseigne. Avec 70 millions de clients chaque année, dont l’équivalent de la moitié de la population française pendant le pic de la saison estivale, Decathlon est une référence incontournable dans le monde du sport capable d’influencer bon nombre de sportifs, et plus largement d’avoir un impact sur les habitudes de consommation des Français.
« Je veux que des millions de personnes laissent leur voiture chez eux »
— Marc Balme, responsable du pôle ingénierie à Decathlon
Contrairement à Decathlon, qui investit beaucoup en recherche et développement et possède aujourd’hui une boutique en ligne entièrement dédiée aux sports connectés, Intersport est principalement un distributeur de marques externes. « Notre approche est différente mais complémentaire », détaille Romain Revol à propos de son entreprise qui fête ses 100 ans cette année. Il s’accorde néanmoins sur le succès global des objets connectés dans le sport, ajoutant les vélos électriques et les ceintures « cardio » pour la course à pied. Le commercial avertit néanmoins sur les limites de ces outils connectés : « La tech dans le sport, c’est comme dans la société, il faut que ça reste un plus et pas que ça devienne une dépendance ».
Crédit Image à la Une : Decathlon