L’IA peine à s’imposer dans la gouvernance des données de l’industrie pharmaceutique

L’IA peine à s’imposer dans la gouvernance des données de l’industrie pharmaceutique

Aujourd’hui, l’IA transforme de nombreux secteurs, qu’il s’agisse de l’éducation, de la finance ou encore de la santé. Son impact se fait d’autant plus ressentir au sein de l’industrie pharmaceutique: très présente dans la recherche et le développement, elle peine pourtant à être adoptée. C’est ce que révèle le rapport publié par la société de conseils ProductLife Group (PLG). Décryptage. 

110 milliards de dollars annuels, c’est ce que pourrait générer l’IA pour le secteur pharmaceutique selon une étude menée par McKinsey Global Institute. Un chiffre prometteur qui suscite à la fois des espoirs et des inquiétudes parmi les entreprises du secteur. Pour éclairer ce sujet, la société de conseils PLG a publié un rapport détaillant l’impact de l’IA sur l’industrie pharmaceutique. Une étude s’appuyant  en partie sur la littérature existante dans le secteur. 

« Nous nous sommes ancrés dans la littérature pour comprendre les thèmes, les impacts et enjeux de l’IA dans notre industrie. Nous avons mené nos recherches avec les papiers publiés par les concurrents de conseils ou des industries pharmaceutiques », explique Annie Jullien-Pannelay , associée en conseil chez PLG. Des recherches complétées par des papiers académiques, mais aussi par des interventions d’experts métiers. 

Une surreprésentation de la recherche du développement

L’étude menée par les experts révèle une forte concentration de l’IA dans la recherche et le développement pharmaceutique. Cette dernière s’explique par différentes raisons, selon les professionnels. « Les patients académiques incluent les recherches hospitalo-universitaires. Il y a un intérêt car en recherche et développement on produit beaucoup de données qui peuvent être multimodales », précise Gabriele Breda, directrice de recherche et d’innovation au sein de PLG. 

Les algorithmes d’apprentissage automatique peuvent ainsi analyser de grandes données biologiques, chimiques et cliniques pour trouver de nouvelles voies thérapeutiques. Ce qui permet de gagner du temps par rapport aux processus de R&D traditionnels plus coûteux et contraignants. « On observe la possibilité de réduire le temps de découverte de recherche préclinique, on gagne 12 à 18 mois », souligne Gabriele Breda. 

« On observe la possibilité de réduire le temps de découverte de recherche préclinique, on gagne 12 à 18 mois »

– Gabriele Breda, directrice de recherche et d’innovation au sein de PLG

L’intérêt de l’IA dans la R&D est surtout de permettre la découverte de nouveaux médicaments, mais aussi d’optimiser les essais cliniques en sélectionnant les patients les plus adaptés. 

Au-delà de la recherche et du développement, le domaine réglementaire est aussi bien représenté,  selon le rapport mené par les chercheurs. « Il y a un champ d’application pour l’IA direct et l’IA générative car il y a beaucoup de données textuelles avec la possibilité d’utiliser des données qui viennent des entreprises », précise Gabriele Breda. Cependant, si l’IA se développe également au service de la pharmacovigilance, de la qualité et de la fabrication, elle rencontre encore des limites. 

Encore des difficultés d’adoption

Aujourd’hui, la standardisation des données reste encore manquante dans certains domaines, pourtant elle est essentielle pour maintenir la confidentialité et la sécurité des informations utilisées. « Il y a la question des compétences à acquérir qui se pose aussi, pour avoir une première idée de l’IA et garder un sens critique. Il faut accompagner ce changement culturel de compétences, d’organisation et de gouvernance », conclut Gabriele Breda. 

« Il y a la question des compétences à acquérir qui se pose aussi, pour avoir une première idée de l’IA et garder un sens critique. Il faut accompagner ce changement culturel de compétences, d’organisation et de gouvernance »

– Gabriele Breda, directrice de recherche et d’innovation au sein de PLG

Une gouvernance de données qui reste encore difficile à mettre en place en raison du manque d’encadrement. Si l’IA Act entrée en vigueur en janvier 2024 marque un premier  pas vers la réglementation, les normes spécifiques à l’industrie pharmaceutique se font attendre.

Ces enjeux techniques et humains restent à surmonter et freinent l’adoption totale de l’IA au service de l’industrie pharmaceutique. Encouragé par les retours rendus par les grands laboratoires, PLG prévoit de lancer une nouvelle étude pour approfondir et évaluer  les attentes des acteurs du secteur pharmaceutique.

Pour aller plus loin:

VIDÉO|Démocratiser l’IA en santé

Crédit Image à la Une : pixabay