Alors que l’AIM, l’événement dédié aux usages quotidiens de l’IA a ouvert ses portes ce matin au Vélodrome de Marseille, CScience s’est intéressé aux nouveaux coachs sportifs virtuels. Comment l’intelligence artificielle bouscule aussi notre rapport au sport ? L’arrivée de ces mentors 4.0 propose une nouvelle approche de l’entraînement sportif. Décryptage.
Vous préférez un coach sportif sévère ou une entraîneuse sympathique ? Philippe l’autoritaire, Joy la positive, ou encore Socrate le philosophe sont quelques-uns des nombreux coachs virtuels qui fleurissent partout sur nos écrans. Tous trois ont été mis au point par RunMotion Coach, une solution SportTech fondée par deux frères jumeaux savoyards et grands coureurs depuis 20 vingt ans.
« On a eu l’idée de créer un “chatbot” basé sur de l’IA bien avant ChatGPT » souligne Romain Adam, co-fondateur et président de la jeune pousse. Avec ses 840 000 inscrits depuis son lancement en 2018, l’application se classe au deuxième rang mondial dans le coaching de course à pied. Un succès dû aux avantages qu’elle présente face aux coachs sportifs classiques.
Personnalisation, flexibilité, inclusion
« On a pensé à “Philippe” pour notre coach autoritaire en référence à Philippe Etchebest et Philippe Lucas, deux coachs connus pour leur sévérité » sourit Romain Adam. Sur l’application RunMotion Coach, les coureurs et les coureuses peuvent choisir entre trois types de coachs virtuels pour personnaliser les entrainements selon leurs besoins.
« Le but est d’aller toujours plus loin dans la personnalisation » souligne Romain Adam, « notamment pour le public féminin ». Il explique que lorsque plusieurs coureuses rapportaient des difficultés à suivre le rythme selon la semaine de leur cycle, il décide alors d’intégrer cette donnée dans les paramètres de calcul des entraînements. Avec seulement 45 % d’utilisatrices sur RunMotion Coach, cette nouvelle fonctionnalité entend rendre l’application plus inclusive.
« Le but est d’aller toujours plus loin dans la personnalisation »
— Romain Adam, président et co-fondateur de RunMotion Coach
Un paramètre important dans l’entraînement qui est rarement pris en compte par les coachs sportifs classiques. Ces derniers gèrent parfois jusqu’à soixante athlètes en même temps, et très souvent à distance. À l’inverse, les mentors virtuels sont disponibles 24/24 et 7/7 jours, là où un coach pourra difficilement répondre aux questions posées à 23 H le dimanche soir.
Un bénéfice que souligne également Brigitte Ekpe Lordonnois, orthoptiste depuis 20 ans et fondatrice de la solution Optimeyes. Il y a un an, elle développe avec l’entreprise lyonnaise IA Medical un agent conversationnel qui aide les sportifs de haut niveau à mieux utiliser leur vision.
« Je suis beaucoup en déplacement, ici le but est d’être présente à différents endroits » rapporte-t-elle. Ces applications permettent aussi de s’adresser à un public « loisir », qui sollicite très rarement l’accompagnement d’un coach. Pour RunMotion Coach par exemple, l’accès à un coach virtuel est gratuit, bien que l’application propose également une version premium.
Un outil surtout complémentaire
Si ces nouveaux mentors virtuels présentent de nombreux avantages, ils restent avant tout un outil complémentaire. « On remplacera jamais complètement l’humain » explique Romain Adam.
Brigitte Ekpe Lordonnois abonde : « Remplacer, je ne pense pas, mais augmenter, oui ». Selon elle, les premiers temps d’échanges et d’acculturation entre les coachs et les sportifs restent essentiels.
« Remplacer, je ne pense pas, mais augmenter, oui »
— Brigitte Ekpe Lordonnois, présidente et fondatrice d’Optimeyes
Notamment pour transmettre son approche globale de l’optimisation visuelle dans le sport. « 80 à 90 % des informations sensorielles qu’on utilise dans la vie courante et la vie sportive proviennent de la vision » explique la spécialiste, « mais seule l’acuité visuelle est mesurée ». Elle déplore que les capacités à être précis, à repérer des choses dans l’espace ou même à réagir rapidement par le geste ne soient pas prises en compte chez les athlètes.
Les deux formes de coaching ne sont d’ailleurs pas excluantes. Romain Adam précise que parmi les utilisateurs, certains sont licenciés, tandis que d’autres rejoignent des clubs sportifs pendant ou après avoir utiliser l’application. « Un cercle vertueux », se félicite-t-il.
Son frère jumeau, co-fondateur de l’application, est d’ailleurs lui-même coach de running diplômé. Quant à la confidentialité des données, Brigitte Ekpe Lordonnois met en garde sur ses dangers : « On est tous très intéressés par ce que l’IA va apporter, mais il faut réfléchir aux usages, dans le respect de la déontologie, de l’éthique et des exigences de chacun ». Les données de santé doivent à tout prix être protégées pour la professionnelle de soin.
« On est tous très intéressés par ce que l’IA va apporter, mais il faut réfléchir aux usages, dans le respect de la déontologie, de l’éthique et des exigences de chacun »
— Brigitte Ekpe Lordonnois, présidente et fondatrice d’Optimeyes
« Par rapport à un très bon coach, on ne sera pas forcément meilleur, mais on est quand même meilleur que beaucoup de coachs » conclut Romain Adam. L’application RunMotion Coach, déjà présente dans les pays francophones, anglophones et hispanophones, sera disponible aux Pays-Bas et en Allemagne dès la semaine prochaine.
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Crédit Image à la Une : RunMotion Coach