Maintenance prédictive, main d’œuvre connectée, technologie immersive… Si des freins au changement persistent, la réalité augmentée et l’intelligence artificielle se fraient doucement une place dans les entreprises industrielles. CScience vous propose une brève sélection des applications concrètes déjà disponibles et en cours d’adoption pour l’industrie.
Et si l’intelligence artificielle pouvait sauver des vies au travail ? Christophe Depont est directeur commercial industrie chez Sysnav, une PME française qui développe des solutions innovantes de géolocalisation et de capture de mouvement pour les environnements complexes.
Il est venu présenter deux technologies phares au SIdO : un petit appareil de 80 grammes rattaché aux travailleurs isolés ou à risque, et une puce collée au matériel d’urgence (extincteur, défibrillateur) en cas de crise. Les accidents de travail, encore trop courants dans certains sites industriels trop à l’écart des grands réseaux de communication, pourraient être limités grâce à l’usage de la technologie. C’est le cas dans la filière du nucléaire notamment, où la géolocalisation n’est pas possible, exposant les travailleurs isolés à de hauts risques en cas de chute ou de malaise. « On retrouve une victime parfois trois jours après dans l’industrie » rappelle le responsable, « tandis qu’une puce de la taille d’une pièce de deux euros peut sauver des vies ».
Un casque de réalité augmentée pour les opérations de contrôle
La réalité étendue (RX) commence elle aussi à faire ses preuves dans le secteur industriel. Alexandre Gontier, responsable des ventes au sein de l’éditeur de logiciels industriels français PcVue, liste les mérites d’une plateforme logicielle connectée en usine, combiné à un casque de réalité étendue. « Ici, le casque de RX donne accès à un écran de contrôle permettant d’ajuster en direct les fonctionnalités d’une machine » détaille-t-il.
L’espace de réalité augmentée permet par exemple de rédiger un message qui sera partagé en direct avec le centre de contrôle, ou un technicien situé parfois de l’autre côté du site industriel, le tout avec les deux mains libres pour expliquer et réparer rapidement le problème.
On parle alors de main d’œuvre connectée : la plateforme logicielle et le casque de RX amplifient les compétences des employés qui gagnent en autonomie et en efficacité. In fine, c’est toute l’entreprise qui bénéficie de ces outils technologiques, du budget formation aux résultats de performance grâce aux gains de temps.
Une maintenance prédictive grâce à l’intelligence artificielle
L’usage de l’intelligence artificielle dans l’industrie a donné naissance à des modèles prévisionnels : on parle alors de maintenance prédictive. Ce nouveau mode de maintenance permet une optimisation opérationnelle – un gain en termes de temps de travail, grâce notamment aux relevés de tracés.
« […] si le côté très “techno” peut plaire à une certaine tranche d’âge, ces outils mettent du temps à pénétrer à l’industrie, qui reste un secteur assez conservateur »
— Alexandre Gontier, responsable des ventes à PcVue
Dans cette lignée, une entreprise industrielle à la pointe de la technologie peut également bénéficier d’une certaine attractivité, de la part à la fois des clients et des employés. Mais pour Alexandre Gontier, responsable des ventes à PcVue, « si le côté très “techno” peut plaire à une certaine tranche d’âge, ces outils mettent du temps à pénétrer à l’industrie, qui reste un secteur assez conservateur ».
Des outils au service de la relation client et de l’administratif
S’il est une fonctionnalité où l’intelligence artificielle semble déjà largement répandue, y compris dans l’industrie, c’est pour les tâches liées à la relation client et au traitement administratif.
« Les femmes et les hommes qui travaillent en entreprise ne sont pas des robots, donc si on peut leur enlever des tâches répétitives – et non pas des missions, qui est là où se situe le sens du travail – c’est tant mieux » explique Gaëtan de Sainte Marie, président de la commission numérique nationale de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME).
En ce sens, les chatbots conversationnels et les logiciels de traitement informatique permettent de se soustraire aux tâches les moins stimulantes. « Mais là-dessus, on a besoin qu’ils et elles croient en l’IA » avertit-il.
La technologie immersive pour la formation professionnelle
Les outils immersifs facilitent également la formation des salariés. « La réalité augmentée va avoir un impact sur les sens », souligne Marc Bringuier, directeur du développement commercial en Europe de la solution collaborative de réalité augmentée Sphere, rappelant que « sur la courbe d’apprentissage, on se souvient de 90 % de la formation au bout d’une semaine, et seulement 10 % six mois plus tard ».
La réalité augmentée va permettre ici de stimuler la formation en s’adaptant à toutes les manières d’apprendre, à l’entrée de nouvelles générations sur le marché, et en simulant des situations grandeur nature.
Il donne l’exemple de la scénarisation, adoptée par la SNCF pour former les accompagnants et les hôtesses aux mouvements de foules, et même aux déplacement des « hooligans » lors des Jeux Olympiques de Paris.
« La réalité augmentée va avoir un impact sur les sens »
— Marc Bringuier, directeur du développement commercial Europe de Sphere
Qantis a adopté un service utilisant l’intelligence artificielle pour former à l’utilisation de la centrale d’achat. « On a trouvé un outil basé sur l’IA pour aiguiller nos membres à comprendre ce produit, ce qui représente un gain de temps énorme » explique le président de la commission numérique. « Et ça ne veut pas dire que je vais virer la moitié des personnes dans ma boite, mais au contraire je vais leur donner des tâches plus importantes » conclut-il. Ou leur permettre de partir plus en vacances.
Pour aller plus loin :
[ÉDITORIAL] : L’adoption de l’IA en entreprises, entre volonté de croissance et manque de confiance
Crédit Image à la Une : Gerard Siderius