La Journée du financement de la tech, organisée par le cluster Digital League, a réuni près de 300 personnes le 21 novembre dernier au sein du Campus Région du numérique. L’occasion pour le spécialiste de la finance durable et des innovations disruptives de marché François-Xavier Oliveau d’aborder les grandes mutations qui vont bouleverser notre quotidien ces prochaines années.
Mobilité, énergie, travail… L’avènement de la technologie bouleverse notre société à toute échelle et dans des proportions jamais atteintes. Des mutations profondes, mais pas incompatibles avec les enjeux sociaux et environnementaux que traverse notre époque selon François-Xavier Oliveau.
Cet investisseur et contributeur de Think Tank est l’auteur de « Microcapitalisme, vers un nouveau pacte social », un essai dans lequel il défend un changement radical du système social français en accord avec la révolution digitale. Une vision qu’il est venu défendre devant des dizaines d’experts en finance et en innovation au Campus Région du numérique ce jeudi 21 novembre.
Une énergie renouvelable à un coût plus abordable
« Quand vous êtes arrivés ce matin, cette salle était éclairée et personne n’y a fait attention, alors que c’est un miracle de la technologie » lance François-Xavier Oliveau pour interpeller son public. Avant de justifier : Le prix d’une heure d’éclairage est passé de l’équivalent de 58 H à seulement 42 secondes travaillées en l’espace d’un siècle. Un chiffre saisissant pour illustrer l’avènement imminent des nouvelles sources d’énergie dites renouvelables.
« La techno qui gagne, c’est celle dont les coûts baissent le plus vite, et non pas la moins chère ». Il avance à ce titre l’exemple du passage de l’énergie solaire pour les batteries électriques en Californie. La solution selon lui est de surdimensionner la production d’énergie, un argument inspiré du think tank Rethink X – qui propose rien de moins que repenser l’humanité. « En augmentant la production du solaire par 3,4, et celle de l’éolien par 0,4, nous aurons de quoi fournir de l’énergie à 3 centimes de dollars du kilowattheure (KWh) d’ici 2030 en Californie » souligne l’expert.
Un cas pratique réplicable à peu près partout en Occident, bien que dans les pays moins ensoleillés comme l’Allemagne l’effort de production devra être plus important pour un coût final de l’énergie un peu plus élevé – environ 9,7 centimes de dollars du KWh. « Ensuite c’est magique : la techno qui gagne rentre dans un cercle vertueux tandis que la techno remplacée s’engouffre dans un cercle vicieux » conclut François-Xavier Oliveau. Il cite l’exemple des Etats-Unis, où « la sortie du charbon est bien réelle » face au succès croissant du solaire, « dont l’essor n’a pas été freiné par le premier mandat de Trump contrairement aux idées reçues ». À voir si cette réalité se confirme les quatre prochaines années.
L’avènement du véhicule électrique voire autonome
Sur la mobilité, l’expert évoque deux grandes mutations, à commencer par le passage de l’électrique au thermique. Si l’Europe a clairement ralenti, sauf quelques rares exceptions comme la Norvège, François-Xavier Oliveau avance que le véhicule électrique représentera la quasi-totalité des parts de marché d’ici dix ans. « On sera à 98 % d’électrique en Europe à la fameuse date de 2035, sans besoin de réglementation » soutient-il. Seul hic, le prix. Sur la période janvier-octobre 2024, l’avantage de prix d’une voiture électrique entrée de gamme par rapport à son équivalent thermique est positif – donc négatif – à +3 % en Europe. Il est de -16 % en Chine et de -9 % en Amérique du Nord.
« On sera à 98 % d’électrique en Europe à la fameuse date de 2035, sans besoin de réglementation »
– François-Xavier Oliveau, investisseur et essayiste spécialiste des innovations disruptives
Les véhicules autonomes pourraient bien eux aussi faire partie de notre quotidien dans une dizaine d’années. François-Xavier Oliveau invoque ici la loi de Moore – formulée par Gordon Earle Moore en 1965 et qui stipule que la vitesse du processeur ou la puissance de traitement générale des ordinateurs double tous les deux ans – avec une baisse de prix de ces véhicules sans chauffeur évaluée à 23 %.
Il prend pour témoin la ville de San Francisco. Les taxis autonomes Waymo de Google, introduits en phase de test depuis 2014, ont permis d’éliminer deux tiers du trafic routier en heure de pointe et 90 % des véhicules au global, tout en réduisant le stationnement sur la chaussée et en augmentant la sécurité routière – oui, le taux d’accident est moins élevé pour les véhicules autonomes. Selon l’expert, les véhicules autonomes, en nous libérant de la tâche de conduire, constituent une opportunité pour plusieurs secteurs : les services, le divertissement, l’immobilier ou même l’hôtellerie. « La chaîne Accor pourrait investir dans des chambres d’hôtel mobiles » s’amuse François-Xavier Oliveau.
Plus de robots humanoïdes dans notre quotidien
C’est une surprise pour personne, les ruptures technologiques bouleversent également le monde du travail, et ce depuis plusieurs décennies. Néanmoins, la démocratisation des robots intelligents a permis de réduire drastiquement leur prix d’achat, avec des offres dès 15 000 euros. « Une somme encore conséquente pour un robot mais qui ouvre la voie à des leasing entre 200 et 300 euros par mois pour avoir un ouvrier à temps plein » résume François-Xavier Oliveau.
Selon lui, les robots généreront d’ici quelques années près de 100 000 milliards de chiffre d’affaires, soit 95 % du PIB mondial du marché du travail. Et l’avènement des robots-salariés entraînera inévitablement la démocratisation des robots-domestiques. Pour bien comprendre, François-Xavier Oliveau compare le prix d’achat au kilo d’un robot à celui d’une moto dans dix ans – respectivement 100 euros et 40 euros. « A ce stade, on en aura tous un à la maison pour faire nos tâches domestiques » constate-t-il.
« Une somme encore conséquente pour un robot mais qui ouvre la voie à des leasing entre 200 et 300 euros par mois pour avoir un ouvrier à temps plein »
– François-Xavier Oliveau, investisseur et essayiste spécialiste des innovations disruptives
Et s’il est une mutation plus bruyante que les autres, c’est bien celle de l’intelligence artificielle. « Une baisse de prix de -95 % par an, c’est juste complètement délirant » lâche François-Xavier Oliveau. L’IA est selon lui une industrie en pleine explosion qui agit comme un catalyseur « en accélérant la baisse du coût de toutes les industries ».
L’expert conclut sur la citation d’une figure pour le moins controversée – Elon Musk – dans laquelle l’homme le plus riche du monde encourage coûte que coûte l’intelligence artificielle, en dépit des effets sur certains droits sociaux et environnementaux. « On peut le croire ou ne pas le croire, mais c’est un milliardaire » sourit François-Xavier Oliveau, laissant planer un doute en guise de clin d’œil. Reste à savoir si la vision de milliardaires technophiles façonnera le monde réel de demain.
Pour aller plus loin :
L’IA comme réponse aux incertitudes géopolitiques et environnementales
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